Des mots les uns à la suite des autres...

Assassin


Igor Yolejitsine sortit du bâtiment grisâtre qui abritait les locaux du KGB et alluma une cigarette. Le temps était froid. Encore une personne à tuer. Evidemment, on donnait le sale boulot à Igor et aux autres, les primes revenant aux gros bonnets. De toute façon, l’action était devenue mécanique. Cherche- le. Trouve-le. Tue-le. Cette fois, c’était une femme. Il ne connaissait pas son nom, ne l’avait jamais vue, mais pourtant, c’est lui qui lui retirerait la vie. D’après ce qu’on lui avait dit, elle aurait donné des renseignements de haute importance à l’ennemi ou quelque chose dans ce genre là. Qu’est-ce- qu’il en savait ? Lui, il aurait juste à appuyer sur la gâchette le moment venu.

Il descendit la rue qui menait à la place Trubnaya. Il était bientôt arrivé. Il vérifia l’adresse et s’engouffra dans une ruelle sombre. Son cœur cognait dans sa poitrine. Un pas. Un battement. Un pas. Un battement. Sa vue commença à se brouiller. Il connaissait ce sentiment, un sentiment de puissance et d’invincibilité ; et pourtant….ce n’était pas comme les autres fois. Un étrange frisson le parcouru. Il lui sembla qu’il connaissait cette rue. Il sonna à une porte. Une voix lui répondit. Les battements de son cœur augmentèrent. Il se présenta et demanda à la femme de lui ouvrir. Elle s’exécuta. Igor sentit son corps vibrer d’excitation. Mais quelque chose le taraudait. Il connaissait cette voix….il l’avait si souvent entendue…Il monta dans la cage d’escalier et attendit qu’elle descende. Il sortit son revolver. Ses gestes devinrent mécaniques. Il ne pensait plus, ne réfléchissait plus. C’était quelqu’un d’autre. Il entendit des pas dans l’escalier. Il chargea son arme et attendit. La jeune femme apparut, le visage caché par la pénombre. En automate, il pointa son arme vers le corps frêle de la femme. Il n’entendit pas celle-ci « Mais que fais-tu, Igor ? ». Il tira. Un coup. Deux coups. Trois coups de feux retentir dans l’appartement. La jeune femme s’écroula. Il regarda autour de lui pour voir si quelqu’un accourait. Il ne vit personne. De toute façon, tout le monde dans l’appartement avait su ce qui s’était passé ; et qui voudrait mourir pour sauver un cadavre ? Rassuré, Igor repartit dans la ruelle. Il avait accompli son boulot.

Octobre 1939. Mme Yolejitsine est retrouvée morte dans la cage d’escalier de son appartement, assassinée froidement, trois balles dans la poitrine.